Auprès de la candidate, Chevènement retrouve une nouvelle jeunesse
NICOLAS BAROTTE.
Publié le 11 avril 2007
L'ancien ministre joue un rôle clé dans la campagne.
RÉVÉLATION de la campagne socialiste 2007 ? Jean-Pierre Chevènement ! « Il a explosé, l'homme solide de la campagne, c'est lui », assure un proche de Ségolène Royal. Présent aux meetings (la semaine dernière dans le Var, il était aux côtés du premier secrétaire du PS François Hollande et du président du Parti radical de gauche Jean-Michel Baylet), sur les plateaux de télévision, aux conférences de presse de campagne ou dans les réunions au siège du PS, le président d'honneur du MRC est devenu l'un des hommes clés de la candidate socialiste. À tel point qu'hier, elle a fait appel à lui pour la remplacer au pied levé sur Europe 1. Vendredi, la candidate tiendra un meeting dans son fief de Belfort.
Alors que tant de socialistes doutent, Jean-Pierre Chevènement est conquis. « Ségolène Royal donne le spectacle d'un calme absolument olympien, a-t-il déclaré hier. Je n'ai jamais vu une femme aussi résistante, aussi constante, manifestant une grande égalité d'hu meur. Ségolène Royal montre des qualités qui sont des qualités de chef d'État. » Il dit n'avoir pas d'inquiétude sur sa présence au second tour.
Belle revanche pour l'ancien candidat à la présidentielle, présenté par Lionel Jospin comme l'un des principaux responsables de sa défaite en 2002 (il avait obtenu 5,33 %). Cinq ans plus tard, il fait partie du premier cercle autour de Ségolène Royal. Si Jospin a obtenu que son rival ne figure pas dans « l'équipe du pacte présidentiel », Chevènement n'en a pas pris om brage : cette équipe ne s'est jamais réunie. « Chevènement fait partie de ceux qui sont écoutés », observe le député européen Vincent Peillon, qui attribue cette qualité à « sa compétence » et « sa grande loyauté » vis-à-vis de Royal.
Si l'alliance électorale s'est nouée au mois de décembre, les relations entre les deux sont plus anciennes. Au sein du gouvernement Jospin, Royal et Chevènement s'étaient trouvés sur la même longueur d'ondes. Elle avait notamment défendu le ministre de l'Intérieur sur sa ligne de fermeté vis-à-vis de la délinquance. Aujourd'hui, l'an cien membre fondateur du parti d'Épinay « a beaucoup de tendresse pour elle », assure un proche de Royal qui lui trouve un air de « papy » politique et sympathique. « Ce n'est plus le même personnage ».
« Le drapeau, c'est lui »
Dans les discours de Royal qui exaltent « l'ordre », il y a du Chevènement : sur la République, la nation, la défense, aussi. « Le drapeau, c'est lui », commente-t-on au PS. Il a aussi su peser lors du débat sur la place du nucléaire et tempérer la ligne de Ségolène Royal. Mais c'est sur l'Europe et la « révision des statuts » de la Banque centrale européenne que l'influence de l'ancien partisan du non à la Constitution européenne est la plus perceptible. C'est ce qui inquiète certains socialistes proeuropéens : « Dans cette campagne, on voit davantage Chevènement que Delors. »
« Je crains qu'il ne soit le véritable directeur de campagne », grince un partisan de Lionel Jospin. « Cela peut contribuer » à la fuite des voix du centre gauche vers François Bayrou, estime-t-il. Malgré ces réserves, Jean-Pierre Chevènement, qui est âgé de 67 ans, figure désormais dans la liste des premiers ministres possibles en cas de victoire, même si ce n'est pas l'hy pothèse la plus probable. « C'est un cas de figure qu'on ne peut écarter », pense un proche de Royal, qui souligne « l'expérience » de l'ancien ministre. « La couleuvre serait difficile à avaler », rétorque un ancien partisan du oui à la Constitution européenne.
Avant d'envisager un éventuel ministère, Jean-Pierre Chevènement doit d'abord songer à son élection comme député dans le Territoire de Belfort. En 2002, il avait été battu. Cette fois, de meil leures conditions sont réunies pour qu'il retrouve son siège : dans le volet électoral de l'accord conclu avec Ségolène Royal, le PS a renoncé à présenter un candidat dans sa circonscription. Après cinq ans de purgatoire, Chevènement a bien négocié son retour.