Trés bien, merci

Emmanuelle Cuau, réalisatrice de Trés bien, merci: "En 2002, quasiment du jour au lendemain, la police s'est démultipliée de façon flagrante. J'en voyais de plus en plus : des policiers à rollers, en voiture, à vélo, en fourgon, à pied. J'ai été très frappée par cela, ainsi que par des contrôles d'identité totalement arbitraires auxquels j'ai pu assister. Il faut savoir que depuis cette date, les gardes à vue ont augmenté de 57%, la police a des quotas à respecter, et ils doivent obéir",

Elle poursuit : "Octave, dans La règle de jeu de Jean Renoir (trés bien cette petite ! ), dit à un moment donné : " Ce qui est terrible sur cette terre, c'est que tout le monde a ses raisons ". Dans mon film, Alex a ses raisons, il a le droit d'assister au contrôle de la police. La police, quant à elle, a le droit de le tutoyer et de l'embarquer au poste. Elle a également le droit de l'emmener à l'hôpital. Le médecin a le droit de faire signer une HDT (Hospitalisation à la Demande d'un Tiers) à Béatrice, etc. Quand chacun est dans son droit, que se passe-t-il ? Je n'ai pas de réponse, mais je trouve la question très inquiétante."

Emmanuelle Cuau a filmé son scénario, un scénario de réaction en chaine, implacable et jouissif.
Gilbert Melki est pro-di-gieux !!!
Il peut passer en 2 s. de l'attitude de l'employé stressé-abattu, à celle du cadre arrogant, ou à l'étonné mi-sincère mi-provo (voir ce qui déclenche l'histoire), ou encore une sorte de Harold LLyod, homme comme tout le monde qui parvient toujours à ses fins, malgré l'adversité, mais souvent par inavertance.

A voir d'urgence !

La semaine dernière, j'étais gare du Nord... et j'ai vu des flics emmerder des étrangers...
J'ai donc fait comme Melki dans le film... je les ai suivis lorsqu'ils emmenaient le mec alpagué un peu plus loin de la foule... et me suis mise bien en face...
Le premier mec a été relâché après un appel téléphonique...
2 mn plus tard, 20 m derrière, pan, un Cambodgien visiblement... même topo, ils l'emmènent plus loin... le coincent à 3 flics pour empêcher toute fuite... je me poste en face et regarde...
Et mon train partait... je n'ai pas pu suivre la suite.
J'aurais échappé au destin de Melki dans ce film que je compte voir dès aujourd'hui d'ailleurs ;o)).

Extrait d’un texte de Cécile Giraud, rédactrice en chef d’objectif-cinema.com :

Entre Chaplin et Keaton il y a Melki. Pas (ou peu) d’ironie envers ce personnage qui peut se révéler tour à tour candide et cruel. Melki n’est pas l’idiot du village. S’il doute parfois de ses capacités, il est, la plupart du temps, sûr de lui. Peut-être ne prend-il même pas le temps de se poser la question, non pas qu’il soit inconscient de la cruauté du monde ou des dangers physiques qu’il présente, mais qu’il ne se donne pas d’autre choix que de les affronter pour parvenir à ses fins, qu’il s’agisse d’amour ou de travail. Si Keaton ne doit sa réussite qu’au hasard et à la chance, ce n’est pas le cas de Melki, sans doute le plus téméraire des burlesques.

Si Melki semble si courageux, qu’il n’hésite pas à conduire à 100 à l’heure dans les rues bondées de Paris, à monter à cheval, à affronter un bandit, c’est aussi que, sous ses airs de banalité, nous assistons à chaque film à une véritable fictionnalisation du corps et de l’individu. Melki tente toujours de se faire passer pour celui qu’il n’est pas, face aux autres ou face à lui-même. Il adapte des schémas mythiques à sa propre identité. Dans « Trés bien merci », il s’approprie les caractéristiques d’un personnage qu’il a vu au cinéma. Il va alors reprendre ses gestes, ses expressions, et fera tout pour devenir aussi populaire que le personnage imaginaire.

Melki adapte la fiction à la réalité du film, sans se douter que les personnages « réels » font la part des choses. De la même façon dans « Trés bien merci », il fera croire à sa bien-aimée être le gérant d’un grand magasin, alors qu’il n’est que simple vendeur. L’extraordinaire est que Melki passera de la peau du vendeur à celle du directeur, et inversement, sans modification du corps ou même du costume. Il reste le même, interchangeable, d’une identité à l’autre. »

Note : j'ai triché !!!!!.... dans le texte original, il y avait Harold Lloyd à la place de Melki, New-York à la place de Paris, et « The freshman », puis « Safety last », à la place de « Très bien, merci » !!!!

campagne première a écrit:

Très envie d'aller voir ce film qui nous attend sur le virage de notre siècle : plus de guerre de tranchée, de défense ou conquête de territoire mais une guerre constante liée à la menace terroriste.
J'avais remarqué Melki dans la trilogie de L. Belvaux : captivant garçon.

Je l'ai vu... le film. J'ai fait un commentaire sur Libé.
J'ai bien aimé... surtout Melki... et son air d'homme honnête dans une situation kafkaïenne... j'aurais pété un câble beaucoup plus tôt...
J'ai surtout adoré la fin, absolument immorale...
Des petites longueurs mais un Melki extraordinaire... et des situations tout à fait "quotidiennes et envisageables", encore plus si Sarko passe...

Je l'ai enfin vu : m'a vraiment mise mal à l'aise, le film est totalement crédible grâce sans doute à l'absence d'emphase et de lyrisme.

Le coup du placement en HP m'a fait penser aux trains vers la Pologne : tout le monde fait son travail sans se poser de question, c'est comme ça qu'on peut interner provisoirement un gars qui ne montre aucun signe manifeste de dérèglement psy.
Melki est splendide et S. Kimberlain, toute en nuances .. la fin est amorale à souhait et optimiste surtout : le couple n'explose pas mais sort renforcé.

Comme dirait NS : rien de tel qu'une petite garde à vue et un séjour en HP pour sauvegarder la famille.

clomani a écrit:

campagne première a écrit:

Très envie d'aller voir ce film qui nous attend sur le virage de notre siècle : plus de guerre de tranchée, de défense ou conquête de territoire mais une guerre constante liée à la menace terroriste.
J'avais remarqué Melki dans la trilogie de L. Belvaux : captivant garçon.

Je l'ai vu... le film. J'ai fait un commentaire sur Libé.
J'ai bien aimé... surtout Melki... et son air d'homme honnête dans une situation kafkaïenne... j'aurais pété un câble beaucoup plus tôt...
J'ai surtout adoré la fin, absolument immorale...
Des petites longueurs mais un Melki extraordinaire... et des situations tout à fait "quotidiennes et envisageables", encore plus si Sarko passe...

La fin est amorale ... mais la dernière image tristounette : il descend l'escalier du beau batiment de verre et d'acier ... fait un signe à l'hotesse ... et sort ... tout seul !

... c'est peut-être que j'attendais un petit pas de danse pour conclure (en forme de pirouette)

campagne première a écrit:

Je n'ai pas vu la dernière scène ainsi, L'Gé : espace monumental, glacial, silencieux, le ventre de l'entreprise, il descend l'escalier pour se diriger vers la sortie, il est seul certes mais directeur financier et l'environnement, même exempt d'euphorie et d'attraction, n'est plus pour lui un étau menaçant.

Pareil, parce que, souviens-toi du début, L'Gé : il a son patron sur le dos, qui lui parle de rendement, de fausses notes de frais, de licenciements de collègues... quand on est chef, on est seul... mais super tranquille.
Merci le 'ternet de nous permettre de se refaire une virginité en CV...