Il fallait l'écrire

Editorial du Monde de demain. Dommage qu'il ne soit pas signé, j'aurais félicité son auteur. Ce journal remonte dans mon estime.

L'Etat d'émotion

L 'affaire du petit Enis est l'un de ces faits divers dramatiques qui marquent l'opinion, suscitent l'émotion, soulèvent l'indignation. À la fois parce que la victime est un enfant, et parce que nul ne peut s'empêcher de penser que cette récidive-là aurait pu - aurait dû - être évitée. Dès lors il est normal que l'exécutif démontre rapidement qu'il entend tirer les leçons de cette agression pédophile. D'autant que Nicolas Sarkozy est en phase avec une époque où, dans l'imaginaire des peuples, les destins individuels ont pris le pas sur les grandes aventures collectives. Il entend donc témoigner, à tout instant, d'une attention à la vie quotidienne que la politique et ses acteurs semblaient avoir oubliée.


C'est là que le bât blesse. La politique ne peut se contenter de réponses à l'emporte-pièce, ni se cantonner à une succession de réactions compassionnelles, presque épidermiques à tout épisode marquant de la vie publique. Sauf à prendre le risque d'épouser, et finalement amplifier, tous les emballements de l'opinion publique, aussi compréhensibles soient-ils. La responsabilité de l'exécutif et plus encore celle du chef de l'Etat doit être, évidemment, de chercher des solutions, mais en prenant en compte et en expliquant la complexité des problèmes plutôt qu'en la balayant d'un revers de main ou d'un haussement de menton.

L'annonce de la création d'hôpitaux fermés pour les délinquants sexuels, après la prison, illustre cette dérive. Que le dispositif actuel ait montré, une nouvelle fois, ses limites, voire des carences criantes, c'est une évidence. Ce n'est pas une raison pour y répondre par une solution qui pose de redoutables problèmes juridiques, moraux, déontologiques ou constitutionnels. Cela ne conduit-il pas, subrepticement, à rétablir les peines à perpétuité, au mépris des peines prononcées par la justice ? Comment ne pas mesurer les risques de dérapage que cela pourrait entraîner dans d'autres domaines ? Comment distinguer crimes sexuels et crimes "ordinaires", si l'on ose dire ? Comment confier à des commissions de médecins la responsabilité de trancher, à nouveau, le sort de personnes déjà jugées ? Comment enfin faire croire qu'une nouvelle loi réglerait le problème, quand les dispositions existantes sont aussi peu et mal appliquées, faute de moyens notamment.

A force de vouloir prouver son efficacité, tous les jours et sur tous les fronts, l'"hyperprésident" en fait trop. Non seulement parce qu'il brouille les institutions, réduit ses ministres à faire de la figuration et, au passage, s'expose trop pour durer. Mais surtout parce que le président est menacé de glisser sur une pente dangereuse. Celle qui, à partir de l'attention légitime prêtée aux victimes, aux "vraies gens" et à leurs problèmes, conduit à la démagogie.

très bien cet édito!

et puis quand on a un outreau on pousse la barre à fond dans un sens et quand on a une affaire enis on la pousse à l'opposé. C'est de la bouffonnerie, triste, mais de la bouffonnerie quand même!

En réagissant à chaud à un fait divers, Sarkozy commet la même erreur que ceux qui se sont rués sur l'histoire de l'enfant sans-papier pour en faire un fait politique. Ce qui est énervant, c'est cette façon de tenir absolument à donner son sentiment sur tout et n'importe quoi, en n'importe quelle occasion (alors que seuls les forumistes ont le droit ). Au risque de sortir des phrases qui ne veulent rien dire, genre "le premier des droits de l'homme, c'est celui de la victime".

Sarko ne sait que réagir "à chaud". A quoi sert de vitupérer dans un sens, puis dans un autre, au gré des faits divers qu'ils soient ciblés ( l'enlèvement d'UN enfant en France) ou collectifs (un ouragan quelque part), on oublie d'agir sainement, avec tact et responsabilité, AVANT ce genre d'évènement qui arrive forcément de temps en temps.

A quand deux millions de personnes dans la rue en France, pour proclamer simplement "Bon, maintenant, çà suffit, on veut un président responsable, pas un guignol de fête de quartier..." ?

Ho, Nico, tu te crois encore à la maternelle, avec Eudes, Clotaire, Agnan, Rufus et Marie-Edwige ? Le Bouillon, c'est toi qui pourrais bien le boire....

Sarkozy et Dati font surtout dans la facilité. Personne ne va prendre la défense des délinquants sexuels ( notons au passage que l'on fourre dans le même sac des tas de comportements, la pédophilie étant - si j'ose dire - la cerise sur le gateau dans le lot)... Monsieur Tout-le-Monde n'est pas un délinquant sexuel. Il se contentera dans certains cas du porno de Canal + ou encore il ira surfer sur les innombrables sites de cul qui encombrent le net afin de "gérer" ses pulsions. Mais c'est pas de la délinquance. Donc, Sarko en menacant d'enfermer à vie une certaine catégorie d'individus ( ce qui me semble douteux puisqu'il s'agit là d'une "condamnation à perpétuité" qui ne dit pas son nom) joue sur du velours.
Et ces fameux "délinquants sexuels irrécupérables et dangereux pour la société", quel pourcentage de la population représentent ils? Il n'y en a pas tant que ca. Simplement, leurs crimes sont parfois tellement horribles qu'ils envahissent l'espace médiatique au détriment d'autres problèmes plus répandus dans la population. Citons par exemple la difficulté à trouver un emploi ou un logement, des choses qui touchent DIRECTEMENT une bonne partie des gens dans ce pays. Là on aimerait bien entendre Sarko marteler qu'il va contruire plus de logements sociaux et requisitionner les appartements vides appartenant aux compagnies d'assurances ( entre autres)... Et là, pschiiiitttt! Le vide. Le silence. Il est vrai qu'il est plus facile d'enfermer une poignée de pauvres types que l'on "soignera" loin des regards que de faciliter l'accès à l'emploi et au logement. La démagogie est au pouvoir.
J'aimerais que l'on tape aussi fort sur les délinquants financiers qui sont eux aussi des "irrécupérables" qui n'ont même pas l'"excuse" d'être malades. Les condamnés de l'affaire Elf n'ont toujours pas payé leur amendes. Pourquoi? De quel droit?
Il ont bon dos les "délinquants sexuels". Et lorsqu'un proche de Raffarin allait aux putes, c'était de la délinquance ou pas? Ben non. Lui, il payait.

scud56 a écrit:

Sarkozy et Dati font surtout dans la facilité. Personne ne va prendre la défense des délinquants sexuels ( notons au passage que l'on fourre dans le même sac des tas de comportements, la pédophilie étant - si j'ose dire - la cerise sur le gateau dans le lot)...

Bah pourtant : beaucoup de délinquants sexuels ont eux-mêmes subi des violences sexuelles dans leur enfance, donc sans les excuser, je ne pense pas que le lynchage soit la panacée...

nakata a écrit:

scud56 a écrit:

Sarkozy et Dati font surtout dans la facilité. Personne ne va prendre la défense des délinquants sexuels ( notons au passage que l'on fourre dans le même sac des tas de comportements, la pédophilie étant - si j'ose dire - la cerise sur le gateau dans le lot)...

Bah pourtant : beaucoup de délinquants sexuels ont eux-mêmes subi des violences sexuelles dans leur enfance, donc sans les excuser, je ne pense pas que le lynchage soit la panacée...

Nak, si tu lis jusqu'au bout ce que j'ai écrit, tu verras que je ne préconise pas le lynchage des délinquants sexuels...qui à mon sens sont la plupart du temps des malades et des êtres en souffrance.... Extraire une phrase hors de son contexte n'est pas une très bonne méthode.
Je suis ECOEURE de la démagogie de Sarkozy sur ce sujet qui mérite une approche autrement plus fine .... Est ce plus clair ainsi?

J'avais très bien compris, c'est juste une remarque annexe.

J'ai eu peur un instant Faut dire que je suis un peu tendu en ce moment..... Ca doit être à cause de ce soleil qui me fait mal aux yeux